PSYCHANALYSE N° 9

Le narcissisme. Les fondements de l’humain

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mai 2007

THÉORIE

Le narcissisme et la question de l’originaire. Marie-Claude Lambotte

À la question laissée en suspens par Freud dans “Pour introduire le narcissisme” sur la nature de cette “nouvelle action psychique” qui doit venir s’ajouter à l’autoérotisme pour donner forme au narcissisme, Lacan répond par la formation de l’image spéculaire et la constitution imaginaire du moi qui s’ensuit. Et l’on sait depuis le stade du miroir, trop souvent réduit aux seuls avatars de l’image issus d’un processus identificatoire complexe, toutes les incidences psychopathologiques qui s’en sont trouvées répertoriées, et cela sous des enseignes très vagues, dont la fameuse “faille narcissique” offre un bon exemple. »

« Le narcissisme  et la question de l’originaire » tire son actualité d’une clinique moderne s’intéressant aux formes variées d’altération du moi (dépressions, mélancolie, états dits « limites » ). Revenant à l’origine du moi freudien, M.C. Lambotte montre que la question du narcissisme est fondamentale parce que constitutive de notre rapport au monde (formation de l’image spéculaire, « par quoi est narcissiquement structuré tout amour », dit Lacan ; fonction de l’Idéal du moi). Recourir à ce mécanisme originaire amène, au-delà des ambiguïtés de la classification clinique, à entrer dans une logique de la dépression, du deuil et de la mélancolie, porteur d’hypothèses nouvelles.

À propos de la parution des Lettres à Fliess de Sigmund Freud. Sophie Aouillé

À l’instar de la recommandation de Freud et de Lacan qui ne manquèrent pas, chacun à sa façon, de rappeler qu’il faudrait aborder chaque cas comme si l’on n’avait rien appris des précédents, comme si l’on ne connaissait rien de la théorie, il faudrait pouvoir aborder ces Lettres à Fliess, enfin disponibles en français dans une version non expurgée, comme si l’on n’avait jamais rien lu, comme si l’on ne connaissait rien de la relation qu’entretinrent pendant dix-sept ans Sigmund Freud et celui que Lacan nommera “le médicastre, le chatouilleur de nez”, le médecin berlinois Wilhelm Fliess. »

« Lettres à Fliess », faisant suite à l’événement français de la publication des lettres en 2006, éclaire d’un jour nouveau le mythe de l’autoanalyse de Freud, et ses conséquences pour la psychanalyse.

L’humain est-il une chimère ? Catherine Joye-Bruno 

Dans son édition datée du 7 octobre 2006, le journal Le Monde nous informait que “trois équipes britanniques de biologistes de renom s’apprêtent à créer, via la technique du clonage, des embryons chimériques […] obtenus à partir d’un noyau de cellule humaine placé au sein d’un ovocyte de lapine ou de vache, préalablement énucléé”. Cette nouvelle avancée dans les possibilités scientifiques relance une problématique, régulièrement posée depuis l’avènement des technosciences et dont les éthiciens se sont emparés : en quoi la transgression de la barrière des espèces remet-elle en cause la définition de l’humain ?…

L’ASSOCIATION

L’association. La psychanalyse en Grèce.

« Psychanalyse en Grèce » retrace l’histoire psychanalytique, dans laquelle sont notamment passés les personnages de Freud et de Marie Bonaparte, et rend compte de la situation actuelle, où la psychanalyse reste une pratique marginale, entravée à divers titres, mais en phase d’extension.

LE CAS

Le cas des sœurs Papin : une question de style. Dominique Lechevallier

Le cas des sœurs Papin stigmatise la question de la folie dans le seul passage à l’acte. Peu de commentaires, peu d’éléments accessibles, tout cela paraît creuser l’énigme. Pourtant on en parle : en 1983, Broadway donnait une pièce écrite sur ce fait, tandis que sur place, au Mans, un jeune cinéaste produisait un film sur le même canevas. Après Eluard, Sartre, Genet et bien d’autres, dont deux films il y a encore trois ans, ces productions attestent que le passage à l’acte des sœurs Papin ne cesse pas de ne pas s’écrire. »

« Le cas des sœurs Papin » repris par D. Lechevallier, éclaire, sous un jour subversif que seule la psychanalyse peut apporter, la sombre question du passage à l’acte, sur laquelle Lacan s’était à l’époque prononcé. 

LA PASSE

L’absente. Pierre Bruno

C’est à la fin de notre séminaire que je me suis avisé, et l’ai dit à Sophie Aouillé, qu’il y avait une “absente” dans son enquête : l’École freudienne de Paris. Bien entendu, cette absence allait de soi, puisque l’ambition de Sophie Aouillé était de nous informer sur les associations existantes en 2007. Mais cette absence n’en a pas moins un relief lié à ceci que la naissance et l’histoire infantile de la passe ont eu lieu dans l’EFP, de 1967 à la dissolution de 1980. Il n’est pas très risqué de penser que les raisons qui ont conduit Lacan à faire ce qu’il appelle, en octobre 1968, une “petite réforme”, comme l’accueil, approbatif ou hostile qu’elle a reçu, nous permettent, in statu nascendi, de saisir les enjeux de la proposition et aussi de constater que ces enjeux sont ceux-là mêmes qui, en 2007, nous éclairent sur les lignes de partage que nous avons pu constater. »

« L’absente » est un commentaire de P. Bruno sur un séminaire : « L’enjeu de la passe » dont la grande absente était l’Ecole freudienne de Paris, que l’article resitue dans les péripéties et les enjeux ayant marqué la  «Proposition du 9 octobre 1967 » par Lacan, puis le démarrage de l’expérience de la passe à l’EFP.

La lettre aux italiens… et à quelques autres. Érik Porge

Le texte dont nous allons parler est une lettre. À tous les titres du terme, comme celles de Freud à Fliess, comme la lettre volée. Au départ, il s’agit d’une lettre que Lacan a adressée à trois personnes, trois de ses analysants, aussi analystes, résidant en Italie : Armando Verdiglione et Giacomo Contri à Milan, Muriel Drazien à Rome. Trois personnes que Lacan a appelées son “tripode”. Les deux premières sont italiennes et Muriel Drazien était à l’époque depuis peu en Italie. »

« Lettre aux Italiens », s’inscrit dans l’histoire de Lacan en Italie, au fil laquelle, nous montre E. Porge, le chiffre « trois » n’a cessé d’insister : « tripode » de destinataires auquel était adressée la lettre et sur lequel Lacan voulait asseoir une école italienne rassemblée sous la bannière de la « Cosa freudiana » ; trois fois où Lacan a parlé à Rome. L’originalité de la Lettre consistait en une articulation nouvelle entre la passe et l’association. Même si son projet n’a pas pu fonctionner en 1974, « la lettre insiste », dit E. Porge, entre autres comme référence pour chercher à réunir, autour d’une passe en commun, des associations actuelles… au nombre de trois.

Du « maudit »… au mal-dit. Bernadette Etcheverry

Témoigner ?… Pourquoi ?Lorsque j’entends ou lis des témoignages de passe, je suis frappée par le caractère inédit et singulier de chacun et j’éprouve en même temps un sentiment de proximité, voire de familiarité, avec ce qui s’y trame. Il y a comme un effet de re-connaissance, non sur le modèle identificatoire, mais au-delà, à ce niveau qui fonde proprement le tissu humain dont parle Lacan et qui, pour reprendre une expression de Marie-Jean Sauret, “ne saurait faire d’un être humain un animal”. »

Quand nous lisons le témoignage de passe, intitulé « du Maudit… au mal-dit», nous sommes en effet sensibles à un « effet de re-connaissance », comme le dit B. Etcheverry, par lequel sont touchées des questions aussi universellement humaines que : « Et le féminin, alors ? », et une réponse singulière dans cette passe accomplie.

EXTÉRIEURS
 L’œuf, le bœuf, la meuf. Rémi Checchetto

« Ça commence comme ça : t’as mal. T’es mal. T’es une momie dès le matin, une pile électrique le soir, faisant le négatif de tes gestes, passant par le zéro, côtoyant la boîte à pharmacie, t’as de brusques reflux du temps et tu prends du Maalox affirmant que ce sont des reflux gastriques, tu dérapes dans des temps morts sur les bas-côtés de ton histoire et changes les pneus de ta voiture, tu respires mal et clames qu’ils ne font rien et que dalle à Kyoto, tu dis avoir mal aux oreilles alors que tu endures de n’être pas assez sourd, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe… »

« L’œuf, le bœuf, la meuf », texte poétique autour de ce qui pousse et aboutit à écrire (“tu as la perfection de l’œuf, tu es un écrivain”), croise la psychanalyse, notamment au point où il énonce : “Ceux qui sont sur le mou divan ne s’ignorent plus et c’en est fini de leur écriture”, ce qui nous interpelle sur le traitement du désir.

FREUD

La psychanalyse au Viêtnam. Frédérique F. Berger, Dam-Thu Nguyen Hac

Psychanalyse : Le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Sigmund Freud et la parution en vietnamien des Trois essais sur la théorie de la sexualité nous conduisent à parler avec vous de l’introduction de son œuvre et de la situation de la psychanalyse au Viêtnam. Frédérique F. Berger : Permettez-moi d’abord de vous présenter madame Nguyen Hac Dam-Thu, qui m’a fait l’honneur d’accepter de…

HOMMAGES À ROSINE ET ROBERT LEFORT 

Hommage à Rosine Lefort. Laure Thibaudeau

Rosine Lefort n’est plus. « C’est donc tout à la fois sur l’existence ou la non-existence de l’Autre, sur ce qui lui promet son existence et ce qui lui permet son inexistence ; c’est là-dessus que porte le choix et dans ce cas il est plausible », dit Lacan. Ce choix paradoxal se déplie tout au long de la cure analytique, et il aboutit à la conclusion que l’Autre est barré parce qu’il n’existe pas…. 

Hommage à Robert Lefort. Pierre Bruno

Sur l’instigation de mon analyste Maud Mannoni, j’ai été voir Robert Lefort pour un contrôle dans l’année 1977. Ma pratique d’analyste était alors débutante et je travaillais à l’hôpital de Montauban où je recevais des enfants, psychotiques pour la plupart. J’ai été ainsi le voir pendant environ cinq ans et je me souviens de la grande patience dont il témoignait à mon égard. La plupart du temps, il… 


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