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PSYCHANALYSE N° 17

Transférer, associer, séparer.

Assises sur le savoir du psychanalyste

                                                 PSY_017_L204                                                         

                                                   janvier 2010                                                            

THÉORIE 

La chair du transfert, Fabienne Guillen

Loin de la conception du transfert comme l’ombre d’un amour infantile, Freud pensait déjà le transfert en terme de véritable amour et Lacan en terme de désir actuel. Lacan a choisi Socrate dans tout le mystère de son désir pour produire le sujet-supposé-savoir comme ressort du transfert. Mais il ne suffit pas de susciter le transfert, encore faut-il accepter de l’incarner au sens de s’en faire « la chair ». Là se situe la ligne de partage entre le désir de Socrate et celui du psychanalyste…

L’équivoque de la séparation, Pierre Bruno

La séparation est majeure dans l’œuvre de Lacan à deux titres. Elle est le moment d’engendrement du sujet à partir de sa disparition. Elle a pour conséquence la composition du fantasme. Pourquoi alors ce concept est-il délaissé à partir de 1965? Sans doute était-il difficile d’utiliser le même mot pour parler de la composition du fantasme et de son retournement…

Notes sur des « symptômes contemporains », Silvia de Castro Korgi

Ce travail développe la tension entre les symptômes classiques et les symptômes dits contemporains, écart avancé par certains psychanalystes aujourd’hui. Dans cette perspective, il s’agira d’interroger la formulation même de symptôme contemporain et plus particulièrement de se demander si le concept de symptôme, au sens freudien du terme, reste valide quand on parle de symptôme contemporain. ..

ASSISES DE L’APJL SUR LE SAVOIR DU PSYCHANALYSTE

Les Assises sur le savoir du psychanalyste se sont tenues les 6 et 7 février 2010 à Paris sept ans après la création de l’Association de Psychanalyse Jacques Lacan. Il s’agissait pour celle-ci de vérifier par l’expérience qu’elle a fait, peu ou prou, école. Selon le pari qu’elle s’était donné dans ses statuts.

 Vous trouverez dans ce numéro les rapports de ces Assises, qui se sont articulées en trois temps : le premier consacré au savoir du psychanalyste  le second consacré à la passe et le troisième dédié à l’association….

Le savoir du psychanalyste

Ce texte consacré au savoir du psychanalyste est articulé en trois parties : la première porte sur le statut de ce savoir ; la deuxième expose les thèses marquant les positions inédites élaborées dans l’apjl ; la troisième aborde la situation de ce savoir dans la conjoncture (géographique et historique) actuelle et comporte une prise de parti éventuelle sur telle ou telle question apparue au premier plan. On prendra soin de ne pas considérer ce texte comme exhaustif et définitif, sans pour autant que ses rédacteurs pensent un instant ne pas se vouloir comptables intégralement de son état actuel…

 La passe

« C’est à la mesure du point d’acte qu’il atteint dans le symbolique, que se démontre le réel. ». Lacan. Ce travail a pour objectif de proposer quelques questions pour favoriser le débat lors des Assises. Nous aurions souhaité, dans ce rapport, faire état en les interrogeant des nombreuses interventions de Lacan sur la passe, des débats avec ses élèves, des étapes intermédiaires auxquelles certains…

 L’association

Ce texte est le produit des échanges qui ont eu lieu sur la liste mail de l’apjl à propos de « l’association apjl » depuis le mois de juin 2009. Il se veut « moment photographique » des points vifs que l’association rencontre, de ses doutes et de ses convictions, ainsi que des débats qui la traversent et l’animent aujourd’hui. Chaque associé qui a été désireux de le faire y a posé sa pierre, pour l’offrir…

LE CAS

Le rebours de l’interprétation, Elisabeth Rigal

Le transfert engage la cure. Il ne garantit pas pour autant la portée de l’interprétation de l’analyste, fut-elle bonne. Ce texte montre comment l’interprétation engage l’analyste et vient l’interroger dans sa pratique. Il prend particulièrement en compte les effets de rebours et d’après-coup à l’œuvre dans l’interprétation, côté analysant et côté analyste : dimensions du temps subjectif et de ses effets dans un moment de cure…

HOMMAGE À MICHEL LAPEYRE

Pour rendre hommage à son collègue et ami disparu en 2009, PSYCHANALYSE fait partager à ses lecteurs la réflexion que Michel Lapeyre mena sur le lien social en publiant l’un de ses textes majeurs intitulé « L’association, à la lettre »

L’association, à la lettre, Michel Lapeyre

 « …Un lien social qui rendrait justice au symptôme ne rendrait pas vaine la psychanalyse mais prendrait sa suite. Serait-ce trop demander à l’association de se situer dans cette perspective où elle ne ferait pas ou plus de la psychanalyse son monopole, son pré carré, mais où elle ferait école (et usine et laboratoire et terrain de jeu) pour le discours analytique, pour sa propagation qui va à l’encontre de toute domination et donc de la mainmise sur le symptôme ? En ce sens, la psychanalyse et son association sont forcément anticapitalistes. »…

 

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PSYCHANALYSE N° 16

 Du sujet de nouveau en question

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septembre 2009

THÉORIE

La mélancolie, névrose ou psychose ? La déception essentielle. Marie-Claude Lambotte

La question relative à la structure de la mélancolie prête toujours à discussion. La difficulté tient à plusieurs ordres, dont, en premier lieu, la « fluctuation » de la définition conceptuelle que Freud évoque dès le début de « Deuil et mélancolie ». Freud ne pouvait que se reporter au contexte psychiatrique et culturel allemand de son époque, et l’on connaît, par exemple, les modifications que Kraepelin…

Lapsus du nœud. Pierre Bruno

« Je ne parlerai de Joyce où j’en suis cette année, que pour dire qu’il est la conséquence la plus simple d’un refus, combien mental, d’une psychanalyse, d’où est résulté que dans son œuvre il l’illustre. » Jacques Lacan. Préalablement, je ferai quelques mises au point pour saisir l’enjeu du questionnement qui suit. En 1975 et 1976, Lacan tient le séminaire sur Joyce qu’il intitule Le sinthome. Outre…

L’espace de Schreber est-il un espace fibré ? Yann Diener

Après avoir essayé de parler des espaces fibrés dans le séminaire « Le président écrivant », il m’a été difficile de donner une version écrite de mon intervention. Je suis resté bloqué sur une remarque de Jean-Michel Vappereau ; en effet, quand je lui ai demandé pourquoi Lacan n’avait parlé des espaces fibrés qu’à deux reprises, il m’a répondu : « Parce que c’est un piège tendu par Lacan, et vous…

LE CAS

Me, I am (k)not : manque et ratage comme aspects de l’interprétation dans la cure avec un homme psychotique .Michael Meyer zum Wischen

Lorsque monsieur K. se présente pour la première fois à mon cabinet, il met du temps à commencer à parler. « Au fond je n’existe pas », dit-il, et continue : « Je ne suis pas là, beaucoup trop d’autres choses pénètrent de toute part en moi. » Monsieur K. porte des lunettes de soleil et, dans la salle d’attente, il avait les écouteurs de son mp3 dans l’oreille (tels des bouchons). C’est alors que j’entends…

Un enfant marquant .Marie-Claire Terrier

Nicolas a 8 ans quand il arrive dans l’institution, moi vingt de moins qu’aujourd’hui. Il est suivi en hôpital de jour depuis l’âge de 5 ans. L’école privée qui a bien voulu l’accueillir après son exclusion d’autres écoles de la ville, où depuis l’âge de 2 ans il pose des problèmes, demande grâce à son tour. « Je suis en difficulté, j’ai besoin que tu m’aides », dit-il lors de sa visite d’admission…

DU SUJET DE NOUVEAU EN QUESTION

Réponses d’Érik Porge et de Marie-Jean Sauret aux questions de Nicolas Guérin

« La psychanalyse a joué un rôle dans la direction de la subjectivité moderne et elle ne saurait le soutenir sans l’ordonner au mouvement qui dans la science l’élucide. » Nicolas Guérin : La tradition de critique sociale et culturelle qui existait déjà dans plusieurs productions de la culture, et notamment dans l’art, se développe, depuis quelques années maintenant, au sein de la psychanalyse, et particulièrement…

LA PASSE

De la cause perdue à la passe sans filet. Marie-Frédérique Doisneau

Tout d’abord, je tiens à vous dire combien je suis surprise et émue d’être là, heureuse d’avoir été nommée AE, non sans toutefois un léger retour d’angoisse, ne sachant pas du tout comment je vais occuper cette fonction transitoire d’AE ; peut-être en tentant comme je le fais aujourd’hui de vous parler sur le vif avec une certaine hâte ? C’est l’inconnu et c’est bien ! Tout reste à inventer. Je disais…

LA STRUCTURE

Père et Nom(s)-du-Père (4 ème partie)

En mai 1957, à la jointure entre le Séminaire IV, La relation d’objet, et le Séminaire V, Les formations de l’inconscient, Lacan écrit « L’instance de la lettre dans l’inconscient ». Ce texte comprend très peu de références directes à la question du père, mais n’en présente pas moins un lien avec celle-ci, à partir de la distinction que fait Lacan entre la lettre et le signifiant. En effet, la lettre,…

EXTÉRIEURS

Lambeaux : histoire d’une traversée suivie de Questions à Charles Juliet. Bernadette Etcheverry

En novembre 2008, un collectif lyonnais mit « à ciel ouvert » le produit de sa recherche sous la forme d’un colloque de l’apjl intitulé : « Création et transmission ». Il a invité l’auteur et poète lyonnais Charles Juliet, avec qui plusieurs psychanalystes (dont Jacqueline Ferret et Jacques Marblé) ont déjà tissé des liens forts au cours de précédents travaux. Bernadette Etcheverry, qui au fil de…


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PSYCHANALYSE N° 15

 

Le silence

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mai 2010

THÉORIE

Œuvre de silence. Isabelle Morin

« D’ailleurs, le langage mange le réel. »J. Lacan. Dante, au chant XXIV du Purgatoire, alors qu’il expose à un poète de la génération précédente, Bonagiunta de Lucques, le principe de la dictée d’amour, fondatrice de son « dolce stil nuovo », écrit que l’amour lui dicte ; il précise : « Il dicte, je vais signifiant. » Si je prélève cette expression aller signifiant avant de commencer à écrire, c’est…

Schreber : un monde sans tragédie ? Patricia León

Ce texte se propose avant tout de restituer, à l’analyse de Freud sur l’autobiographie du cas de paranoïa du président Schreber, le problème, souligné à plusieurs reprises par Freud lui-même, qu’impose l’idée de la « transformation en femme » et du « délire d’émasculation » de Schreber, et de tenter cette restitution en fonction de la logique de l’interprétation qu’il fait du cas. En effet, l’idée…

À mi-chemin des psychoses. Jacques Marblé

À mi-chemin des psychoses. S’agirait-il de rallumer la question des états limites ? Y aurait-il un mi-chemin vers les psychoses ? Y aurait-il pour Lacan un chemin sur lequel il aurait pu s’arrêter, à mi-chemin, au lieu de radicaliser la question des psychoses ? À mi-chemin du Séminaire III, qu’en est-il de ce trajet auquel Lacan nous a invité cette année-là en compagnie de Schreber ? Au moment où nous…

Un président devient fou. Michel Mesclier

Ne devient pas fou qui veut, devient président qui le peut. Nous pourrions commencer comme cela, sur ce demi-ton moraliste distinguant vouloir de pouvoir, et méditer sur la maxime par laquelle Lacan fait de la folie l’exception et non la règle, contre Pascal : « Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de la folie que de ne se croire pas fou », quoique, Lacan…

Schreber et les appareils du symptôme. Jacques Podlejski

Revisiter le cas Schreber à la lumière des avancées de Lacan dans son étude sur Joyce, telle fut l’invitation à l’origine de ce travail. On en mesure aisément la difficulté : le Séminaire III sur les psychoses traite d’une psychose avérée, celle de Schreber, et de la logique structurale de son déclenchement pour interroger les conditions de possibilité de son traitement par la psychanalyse. Vingt ans…

LE CAS

Mission impossible. Alain Abelhauser

À Marie-Jean Sauret, pour ses avis et suggestions, ici, mais surtout pour son amitié, partout ailleurs. La guérison : un fantasme ? Non, « la guérison, c’est une demande », répond Lacan dans Télévision, « une demande qui part de la voix du souffrant, d’un qui souffre de son corps ou de sa pensée. L’étonnant est qu’il y ait réponse, et que de tout temps la médecine ait fait mouche avec des mots ». Soit….

L’ASSOCIATION

La foule à l’heure du discours capitaliste. Véronique Sidoit

Je vais commencer par une question qui me paraît fondamentale : comment comprendre que tous ces discours, ces mesures ou ces lois qui mettent à mal aussi bien le lien social que les droits fondamentaux de l’être humain ont autant d’impact, malgré leur analyse et leur dénonciation par quelques-uns, de plus en plus nombreux, malgré le sentiment de plus en plus partagé de graves dérives, comment comprendre…

BETTELHEIM, ET MANNONI

Ce qui reste de Bruno Bettelheim MANNONI Patricia León et Ramón Menéndez

Si l’on accepte l’idée que Victor, mieux connu comme le sauvage de l’Aveyron, était autiste (c’est la thèse soutenue par Uta Frith), la première prise en charge institutionnelle d’un autiste dont on a connaissance est la sienne. Elle a été conçue par Itard à l’institut des sourds-muets de Paris en 1800. Au-delà de la curiosité historique de la description d’Itard, reste la question qui le guide dans…

Maud Mannoni et les « (é)veilleurs d’humanité » Laure Thibaudeau

« Toute innovation véritable dans les domaines de la santé et de l’éducation risque de devenir impossible […]. La recherche est elle-même très compromise […voire] impossible en France du fait des contraintes croissantes de l’administration […] qui, en un mot, gère “la maladie” et ceux qui la traitent. Le désir de l’enseignant, ou du soignant, se trouve ramené à un système d’offres et de simples…

LA PASSE

L’équarrissage Catherine Vasseur

Autant la demande d’entrer dans le dispositif de la passe s’est imposée à moi, autant j’ai vécu la fin de mon analyse comme un acting out. Si nous en avions les lois ou les coordonnées, elle m’aurait été prévisible selon un modèle. Mais j’ai effectué là un forçage. J’ai eu trois analystes, qui correspondent à trois modalités de mon appel à l’Autre. Le premier, c’est à lui que j’ai adressé ma demande,…

LA STRUCTURE

Père et Nom(s)-du-Père (3e partie)

Durant ses jeunes années, Lacan écrit de nombreux textes sur la paranoïa. Il y reprend la théorie freudienne selon laquelle le délire psychotique est de nature homosexuelle. Seules deux remarques purement cliniques concernant le père peuvent être relevées. La première se trouve dans sa thèse rédigée en 1932, consacrée au cas Aimée et intitulée De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité….


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PSYCHANALYSE N°14

Du père réel

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janvier 2009

THÉORIE

L’hystérie, masculine. Balbino Bautista

Malgré les coups tordus des lobbies pharmaceutiques internationaux et l’idéologie anglo-saxonne de l’homme économique qui rêve de réduire à rien la pratique psychanalytique, l’actualité de l’hystérie ne se dément pas si l’hystérie reste ce qu’elle est depuis qu’on sait la reconnaître, une objection majeure à ce qui peut s’entendre comme « perversion ordinaire », soit l’effet même de ce que Jacques Lacan désigne sous le nom de « structure du sujet ». En tant que discours, l’hystérie oscille entre science et religion, art et révolution. Qu’elle fasse valoir le  » sujet » est un fait, un « dire » qui autorisera qu’on réexamine avec Lacan la condition qu’elle pose à l’advenue du « Discours de l’Analyste ». Freud échoue là où Lacan passera. C’est en se faisant « analysant » qu’on dégagera ici les coordonnées de cette problématique.

Les deux rêves de Dora : « Y a le feu au lac ! » Alain Lacombe

Les dernières lignes de l’exposé du cas, nous rappelle A. Lacombe, sont consacrées, par Freud, à mentionner un point de sa propre insatisfaction (ne pas avoir débarrassé plus radicalement Dora de son mal), et à souligner un élément d’opposition entre les deux rêves de Dora (retour vers le père pour le premier, détachement du père pour le second). Relisant ces deux rêves, A. Lacombe opère, de manière singulière, à partir d’une distinction entre « réalisation de désir » (comme réalisation d’un sens, au lieu de l’Autre, avec ce que cela comporte de reste, non réalisé) et « accomplissement de désir » (qui s’en tiendrait à la dimension de l’acte, du côté du sujet). Cet angle de la réalisation, et son versant de non réalisé, ouvre des perspectives nouvelles, notamment sur la répétition du rêve dans la cure, sur la question de Dora telle qu’elle ne cesse de la poser (avec ce petit point d’interrogation sur lequel nous interpelle l’auteur, ultérieurement ajouté par Dora à un énoncé du deuxième rêve), enfin, sur la dimension de la hâte, reliée par l’auteur au « pas d’acte sexuel », au refus du deux du couple, au statut de l’angoisse dans le second rêve, celui dont Freud, précisément, n’a pas pu réaliser l’interprétation. Ce balayage inédit, qui trace comme un nuage de points entre les éléments connus des deux rêves de Dora, s’achève sur l’hypothèse d’un nouage entre la question, non élucidée, du désir que le second rêve réalise, et l’insatisfaction de Freud.

Explorer ce système de nulle part… Sophie Mendelsohn 

La topologie dans l’enseignement de Lacan dans la décennie soixante-dix est plus qu’un support métaphorique, elle devient « un dire de structure », dit S. Mendelsohn.
Pour que la topologie puisse toucher au réel dont elle se motive alors pour Lacan, elle s’oriente sur le dire comme ce qui fait événement de structure, et qui en constitue le réel.
Elle cite Érik Porge (2008), qui considère la coupure comme étant une opération qui concerne conjointement l’inconscient et l’analyste et dont il fait précisément un des fondements de la clinique psychanalytique. Si le signifiant est coupure, alors ce que l’on entend par sujet de l’inconscient en est affecté, puisque si l’abord de l’inconscient structuré comme un langage est modifié, il reste que le sujet de l’inconscient est sujet du signifiant – mais du signifiant comme coupure. Comment l’analyste se trouve-t-il inclus dans le réel de l’inconscient? En effet, si l’interprétation se produit en fonction de l’équivoque qui se réalise du fait de l’équivalence matérielle du signifiant, alors « ce qui s’écoute » existe du fait du tranchement. Ainsi adossée à la coupure dont la topologie permet la « réélisation », la théorie psychanalytique se rend en quelque sorte étrangère à la connaissance pour devenir un moment du devenir du sujet de l’inconscient. Plutôt que d’un savoir référentiel, toujours susceptible de reconvoquer les idéaux qu’il aura peut-être commencé par écarter, il s’agirait donc d’un savoir textuel au sens où l’on a vu Lacan parler de matérialité du signifiant : c’est de la trame du texte dont on parle ici, qui produit moins du sens que des effets de sens, tissant on ne sait quelle surprise équivoquante.

Tot : la mort du père, à la lettre. Freud lecteur de Dostoïevski. Sandra Beosin

L’auteur revient sur l’essai « Dostoïevski et la mise à mort du père » (« Dostoïevski und die Vatertötung ») afin d’interroger son inscription dans la lettre et l’œuvre freudienne. La construction réalisée par Freud, dans cette introduction au roman Les frères Karamazov, autour de la racine « tot », conduit à la rapprocher de deux autres textes que sont Totem et tabou et L’homme Moïse et le monothéisme. L’examen de ce travail de nomination du psychisme nous enseigne sur la conception freudienne du renoncement au religieux. 

Fabriquer la femme qui n’existe pas. Catherine Bruno

A partir du constat, révélé par les mythes antiques, que les hommes ont toujours cherché à fabriquer « La femme qui n’existe pas », C. Bruno explore– faisant se répondre la littérature fantastique, et certains textes de Freud – le désir présidant au rêve d’une femme artificielle. Première découverte, la perfection féminine se réalise, pour l’homme, dans une femme morte ; deuxième dimension, la poupée vient incarner le lien au double ; « la femme artificielle est donc une figure de la femme morte, mais en tant que double qui ne jouit pas ». Tirant les conséquences du trait de la virginité marquant la femme artificielle, C.Bruno sépare finement deux figures que l’on pourrait confondre, d’un côté celle de la femme morte du fantasme masculin qui a pour fonction de contourner la castration, de l’autre celle de la femme (bien vivante) qui apporte la mort et introduit à la castration. De même, elle souligne la différence fondamentale entre la poupée gonflable, pur objet sexuel, et la real doll, partenaire de vie idéale mais inapte au sexe, dont le nombre croissant de propriétaires soulève une question de société, qui n’est pas sans activer dans l’actualité un sentiment d’inquiétante étrangeté.

LE CAS

Une névrose sans symptôme ? Isabelle Morin

Hélène Deutsch présente un cas qu’elle nomme hystérie de destinée, comme contribution au diagnostic d’une nouvelle forme d’hystérie. Elle considère en effet ce cas comme une hystérie « qui ne présente pas de symptôme ». Or il n’y a pas plus de sujet sans symptôme que d’humain sans colonne vertébrale. L’analyse de ce cas montre à quel point H Deutsch reste prise dans le diagnostic de Freud la concernant, qui ne portait pas sur un sujet sans symptôme, mais sur « l’absence de symptôme », que l’analyse n’avait pas permis de faire émerger. Relire H Deutsch, quelques décennies plus tard, nous permet de mesurer ce que nous a apporté l’enseignement de Lacan quand il ouvre la voie d’une direction de cure qui ne tente pas une quelconque pacification par le Nom-Du-Père, mais au contraire qui vise un réel à travers le symptôme. 

LA PASSE 

L’ignorance entre pensée et passe. Panos Papatheodorou

La question de l’entrée en analyse se pose dans l’après coup du témoignage de Passe. Il s’agit d’un témoignage personnel sur le moment du choix qui conduit à s’adresser au dispositif de la passe, traitant la question de l’entrée en analyse à travers l’ignorance et l’oubli. Un rêve d’angoisse sert de fil conducteur pour marquer l’ignorance constitutive de l’entrée en analyse. Cette ignorance, comme passion de l’être, prend un autre biais qui ouvre la voie vers le désir de l’analyste à partir du moment où il y a rencontre avec le réel de la jouissance. Les fragments de savoir qui ont constitué des points cruciaux dans l’expérience du témoignage renvoient à cette ignorance qui précéda l’entrée en analyse. Ce qui change est le rapport de la jouissance à la vérité.

FREUD 

Hystérie

Il s’agit de la traduction d’un article sur l’hystérie paru à Vienne en 1888 dans un manuel de médecine, le Handwörterbuch der gesamten Medizin, édité sous la direction du Docteur A. Villaret. Freud avait alors 32 ans. Ce texte témoigne du moment où Freud passe de la neurologie à la psychanalyse. Le traitement cathartique y est décrit et attribué à Breuer. Des éléments du travail différenciant les paralysies organiques et hystériques, publié en 1893, apparaissent dans des termes identiques. Le terme « inconscient » apparaît dans son acception psychanalytique.

EXTÉRIEURS

L’hétéronymie de Fernando Pessoa. « Personne et tant d’êtres à la fois ». Filomena Iooss

« L’hétéronymie de Fernando Pessoa » présente le grand intérêt de nous plonger dans l’œuvre de « cet énigmatique poète portugais », tout en révélant combien les problématiques émergeant de ses textes (« le Moi, la Conscience, la Solitude ») croisent celles de notre champ. Dans ce balancement entre poésie et psychanalyse, l’auteure nous rend vivant le surgissement des hétéronymes principaux de Pessoa, qu’elle propose de lire comme tentative, paradoxale, de recherche par le poète de son unité perdue, après un « effondrement subjectif » survenu dans son histoire. De même, F. Iooss lie des fragments de textes érotiques et amoureux, énoncés sous la plume d’hétéronymes (dont un féminin), à des questions relevant de la subjectivité du poète lui-même, telles que la frigidité masculine, la négation de l’amour, l’homosexualité, ou le genre neutre (ni homme ni femme) « qui fait certainement fantasmer Pessoa en tant que solution au tragique né de la différence des sexes ».

Le corps n’est pas ce que l’on croit. Pierre Bruno

L’auteur distingue “j’ai un corps” et “je suis un corps” pour aborder l’œuvre du vidéaste portugais Vasco Araujo et particulièrement sa pièce “Far de donna”. A partir de “je suis un corps” en effet, le rapport au corps ne se réduit plus à l’image du corps, mais appréhende celui-ci sans faire l’impasse ni sur les objets qui ne le déterminent qu’en étant prélevés sur lui, notamment la voix et le regard, ni sur sa dimension temporelle qui commence, avant la naissance, dans le mystérieux désir des parents, et se poursuit après la mort dans le rituel de la sépulture.


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PSYCHANALYSE N°13

 Le discours hystérique. Le père et ses noms. Sur Gödel

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septembre 2008

THÉORIE

, La, La. Pierre Bruno

L’exploration du Pacifique s’est faite d’est en ouest. Il aurait fallu en effet, pour parcourir cet océan en partant de l’ouest, toucher et traverser la muraille de l’Amérique. C’est l’histoire des explorateurs marins qui a fixé cette orientation puisque, par ailleurs, les habitants des terres du Pacifique connaissaient celui-ci depuis toujours. Urvater ou la déesse blanche ?Le caractère contestable et contesté des thèses …

Un petit détour par la phobie au seuil de l’adolescence. Frédérique Berger

La phobie a toujours suscité l’intérêt de la psychanalyse et fait l’objet d’élaborations et de remaniements théoriques soulignant ses dimensions de pluralité et de complexité. Selon la psychanalyse, la phobie est présente dans les différentes structures cliniques et fait preuve d’un renversement particulier, car l’angoisse qui est à son origine devient elle-même un symptôme central, soulignant la dimension… 

LE CAS

Le futile préoccupant. Thérèse Charrier

Au hasard d’une enquête sur le vieillissement chez les femmes, Inès Rieder et Diana Voigt ont rencontré une vieille dame de 90 ans qui s’est dévoilée comme étant la jeune homosexuelle du texte de Freud. Elles l’ont entendue pendant deux ans et ont écrit sa biographie sous un faux nom, pour respecter sa volonté d’anonymat : Sidonie Csillag, homosexuelle chez Freud, lesbienne dans le siècle. Vers la… 

LA PASSE

La passe dé-passée. Correspondance. Roseline Coridian, Martine Noël

Psychanalyse a proposé à une analyste nommée analyste de l’École il y a une quinzaine d’années dans l’École de la Cause freudienne, Roseline Coridian, et à une analyste nommée récemment analyste de l’École dans l’Association de psychanalyse Jacques Lacan, Martine Noël, d’entrer en correspondance pour un échange sur leurs expériences respectives de la passe et de la nomination. C’est cet échange dont….

LA STRUCTURE 

Père et Nom(s)-du-Père (2ème partie)

Dans la période allant de 1913 à 1920, qui appartient encore à la première topique, Freud continue à déplier les différents versants de ce qu’il appelle déjà « le complexe paternel », non sans manifester sa division à l’égard de ce terme « commode » introduit par Jung, que Freud lui-même utilise largement, tout en dénonçant les abus et les imprécisions liés à son emploi. À Pfister, en 1910, il écrit…

EXTÉRIEURS I

L’autoportrait en regard de la psychanalyse. Lecture du livre de Pierre Cassou-Noguès, Les démons de Gödel. Pierre Macherey

Les deux livres que Pierre Cassou-Noguès a publiés en 2007, Une histoire de machines, de vampires et de fous et Les démons de Gödel (logique et folie), constituent, on a de sérieuses raisons de le penser, les éléments d’un diptyque. Sans doute relèvent-ils de genres très différents : le premier est un essai de philosophie-fiction, une démarche que l’on pourrait situer dans le sillage de Matrix et des…

Réponse à Pierre Macherey. Pierre Cassou-Noguès

Les démons de Gödel entendent d’abord donner une sorte de portrait, un portrait qui associe des éléments personnels à la logique et aux recherches philosophiques de Gödel. Il s’agit de présenter le personnage mais aussi, en quelque sorte, d’entrer dans le monde dans lequel il vivait. Il s’agit, pour le dire autrement, d’essayer de passer d’une vue extérieure sur le personnage – une vue comme une photographie,…

EXTÉRIEURS II

Far de donna. Vasco Araujo 

Vasco Araujo présentera son travail de vidéaste au Jeu de Paume à Paris à la fin du mois d’octobre 2008. Sur les origines de ce travail, il dit : « Une analyse psychologique de l’être humain, de son existence, de ce qu’il doit faire. Le texte s’inspire à la fois des Dialogues avec Leuco de Pavese, mais aussi d’une analyse psychologie du Moi et de l’Autre ; moi et ma mère, moi et mon père… D’où le…


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PSYCHANALYSE N°12

Le père chez Freud

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 mai 2008

THÉORIE

L’invention de la fin. Pierre Bruno

Ce titre indique une thèse, à savoir que ce qu’on appelle « fin » d’une psychanalyse (je retiens le terme de « fin » dans l’acception désormais courante qu’il a dans le texte princeps de Freud, « Analyse avec fin et analyse sans fin » [1937]) est le résultat d’une invention. Comme toute invention (invention du feu, du cinéma, de l’avion…), elle peut se perfectionner, ou plutôt, pour ne pas utiliser un terme à connotation finaliste ou moralisante, elle évolue. Je n’entends pas proposer l’histoire de cette invention. À vrai dire, une invention, même si elle peut se faire en plusieurs étapes, est intrinsèquement discontinue. Il y a un ou des « avant » et un ou des « après ». Ce que je voudrais en revanche souligner est que la découverte de l’inconscient, aussi extraordinaire soit-elle, est menacée en permanence d’un recouvrement, d’une dénaturation, tant qu’elle n’est pas fondée après coup par l’invention de la fin. Sans cette invention, le concept d’inconscient reste vulnérable et perméable à toutes sortes de falsifications, comme, par exemple, celle qui a fleuri du vivant de Freud, sa dégradation en subconscient.

« La vraie bévue de Freud ». Un os dans la théière de Winnicott. Florence Briolais

La tendance de tout ce qui vit à retourner au repos du monde anorganique domine la vie psychique et la vie en général. Repérée cliniquement sous sa forme d’« éternel retour du même » dans les rêves des névrosés de guerre, les jeux d’enfants, la névrose de transfert et les névroses de destinée, cette tendance est ce qui motive Sigmund Freud, en 1920 dans son article « Au-delà du principe de plaisir », à affirmer « sa croyance en l’existence de la pulsion de mort ». Donald Woods Winnicott (1896-1971), médecin pédiatre et président à deux reprises de la Société britannique de psychanalyse, est celui qui, en 1952, dans une de ses « lettres vives », se situe radicalement contre ce concept freudien de « pulsion de mort ». Pour lui, « les pulsions de vie et de mort sont peut-être la vraie bévue de Freud 3 ». Et il commente ainsi son point de vue : « Ce concept a été introduit par Freud parce qu’il n’avait pas la moindre notion de la pulsion amoureuse primaire » Dans un souci progressiste et positiviste, Winnicott va rejeter le concept freudien et méconnaître son véritable enjeu, tel que Freud l’avait saisi dans cet au-delà du principe de plaisir ; il en fait une bévue. L’enjeu de notre article est donc de revisiter cette conception winnicottienne de pulsion amoureuse primaire.

Virginia Wolf entre maladie et l’écriture. Bibiana Morales 

« Ai-je le pouvoir de rendre la véritable réalité ? Ou écris-je des essais sur moi-même ? » Est la question que se pose Virginia Woolf. Elle interroge ce lien inextricable entre sa maladie et l’écriture de ses romans, qui parfois sont très proches de ses « visions » et du réel de l’hallucination. Comment se servir de la folie pour faire de l’art ? En tant que romancière, elle voulait transmettre du sens esthétique et non du délire. C’est dans les moments de maladie qu’elle trouvait la naissance et la suite de ses romans, donnés par ses visions. Sa création consistait à faire passer ce qu’elle avait de plus particulier, sa folie, dans une fiction accessible au lecteur. Virginia Woolf croyait à l’écriture comme thérapie. Écrire était pour elle faire passer le mal par écrit. Mais son écriture ne la protégeait pas des effets mortifères de chacune de ses crises, et elle ne l’a pas empêchée non plus de se suicider. Chaque livre et surtout chaque publication l’amenaient au franchissement de ses limites. L’écrivain allait au-delà d’elle-même en signant, avec sa création, son entrée dans la psychose. Lacan appelle ce franchissement « le drame subjectif du savant ». Il est le coût subjectif de l’invention où l’inventeur est victime des limites par la création. Quelle est la création de Virginia Woolf ? Si l’écriture fonctionnait comme suppléance pour Virginia Woolf, paradoxalement elle conduisait aussi à une impasse. 

Freud le médium (Notes sur l’affaire de la télépathie). Mickaël Turnheim 

En lisant les textes de Freud sur la télépathie, on est frappé par une rhétorique étrange : d’une part, exigence de la « plus stricte impartialité », d’autre part, signes nets à la fois de fascination et de dégoût. Les lettres à Ferenczi montrent que la question ne le lâche pas. À Eitingon, il écrit que l’occulte, comme le débat Bacon- Shakespeare, le « fait chaque fois perdre contenance ». Tout en affirmant que l’intérêt pour la télépathie relève d’un désir de se retirer de la rationalité (« tentations du principe de plaisir »), Freud pense que l’acceptation de son existence réveille, tout comme la psychanalyse, des résistances (« prétention au savoir des gens instruits ») qu’on devrait surmonter courageusement. Le refus, inhabituel chez Freud, d’assumer la responsabilité de ce qu’il dit donne des tournures parfois presque comiques : « À partir de ma conférence vous n’apprendrez rien sur l’énigme de la télépathie, et vous n’obtiendrez pas même d’information sur cette question : crois-je ou non à l’existence d’une “télépathie” » Pour des raisons sur lesquelles je reviendrai, tout doit rester indéterminé: l’expéditeur, le destinataire et le sens même du message. C’est pourquoi il n’est pas indifférent qu’il s’agisse, avec les textes de Freud sur la télépathie, de cours ou de conférences qui n’ont jamais été tenus : bouteilles à la mer. 

LE CAS

Dora avant et après Freud. Christine Ragoucy

À la différence de l’Homme aux loups, il n’existe pour Dora ni véritablement de récit analytique ultérieur, puisque son travail analytique s’est arrêté avec Freud, ni de recueil d’entretiens ; à la différence de « la jeune homosexuelle », il n’existe pas de récit (auto) biographique. « Dora avant et après Freud » fait ainsi suite à l’article de Karin Adler, « Ida Bauer, la Dora de Freud », qui a présenté les grands traits de la biographie d’Ida Bauer. Je reprendrai de façon plus détaillée les éléments biographiques dont on dispose sur Dora, de façon différente selon qu’il s’agit de la période avant l’analyse menée avec Freud et son récit clinique « Fragment d’une analyse d’hystérie » publié en 1905 ou après. 

L’ASSOCIATION 

Fragments de l’histoire de la psychanalyse en Suède. Malena Hansson 

Toutes les informations de cet article sont tirées de la thèse de doctorat de Per Magnus Johansson : La psychanalyse de Freud, Des héritiers en Suède, publiée en deux tomes. C’est un ouvrage très complet et détaillé sur le mouvement de la psychanalyse freudienne en Suède ainsi que sur dix analystes, praticiens et écrivains, avec chacun son style et sa manière d’aborder l’œuvre de Freud. Il est impossible, bien que l’envie ne manque pas, de tout traiter dans cet article. Je ne prétends donc pas donner une vision complète de l’histoire de la psychanalyse en Suède. Ce article constitue plutôt la reconstitution d’une lecture personnelle de ce doctorat et les points que j’ai eu envie de soulever et de transmettre aux lecteurs de Psychanalyse de ma place de psychanalyste suédoise, formée et exerçant en France, découvrant un morceau d’histoire et d’héritage de la psychanalyse de mon pays d’origine. Je me permets d’ajouter à la fin une petite note sur l’œuvre de Lacan en Suède, ainsi qu’un mot sur l’Association freudienne à Göteborg.

LA PASSE

Droit de cité. Jacques Podlejski

Il y a au moins deux façons d’attraper le thème retenu pour la journée sur « La cité dans la psychanalyse ». Cela évoque l’intervention de la cité, conçue comme extérieure à notre champ, comme venant impacter, voire menacer, par ses lois, par ses réglementations, par les modes de régulation sociale qu’elle promeut, les conditions d’exercice de la psychanalyse. J’ai choisi un autre versant, celui de considérer le groupe analytique comme une cité, selon le sens qui prévalait dans la Grèce antique où ce mot désigne un ensemble de personnes qui s’assemblent sous des institutions communes. On peut à bon droit parler de la cité de la psychanalyse, ou plus précisément des cités de la psychanalyse, dans la cité, pris au sens de l’État moderne.

J’ai été nommé AE, analyste de l’École, après m’être présenté à la passe à la cité APJL. J’ai donc été nommé AE par l’APJL. Mais c’est au sein d’une autre cité analytique – l’École de la Cause freudienne (ECF) – que j’ai effectué le parcours analytique qui, transmis dans le dispositif de la passe, a déterminé cette nomination. Si je suis donc là à vous parler, de cette position d’AE, c’est à ces deux cités que je le dois. En résumé, l’ECF a produit le passant, l’APJL a produit l’AE.

LA STRUCTURE

Père et Nom(s)-du-Père (1ère partie)

Il est manifeste et remarquable que le questionnement de Freud quant au père a émergé dans sa correspondance avec Fliess, et qu’il porte, quelquefois de façon intime, sur le rapport subjectif du fils à son père. Le père freudien gardera cette marque de naissance, l’analyse originelle de Freud, et ne doit rien à une réflexion académique. Les prédicats vont se succéder : séducteur, mort, impuissant, idéal, terrible, etc. Par un renversement, Lacan va reprendre la question du père à partir de son nom, puis de ses noms. Parallèlement, il propose une matrice possible de la structure qui rende intelligible la conséquence, chez l’humain, de son être langagier, au moyen de la tripartition : père réel, père symbolique, père imaginaire. Cette formulation, à elle seule, attire l’attention sur le fait que la fonction paternelle relève du nommé/nommant. Enfin, dans un de ses derniers séminaires, sur Joyce, il s’interrogera sur ce qui pourrait suppléer à cette fonction quand elle est suspendue : le sinthome. Si ni les élèves contemporains de Freud, ni les post freudiens n’ont sensiblement remis en cause ce que Freud dit du père et ont plutôt (M. Klein, D. Winnicott) développé une contribution concernant la mère, les élèves de Lacan, en revanche, n’ont pas la même lecture du legs lacanien sur le père et ses noms. On notera au moins une bipolarisation entre ceux qui insistent sur le caractère transcendant et irremplaçable de la fonction paternelle et ceux qui considèrent que l’élaboration de la catégorie de sinthome minimise et relativise la portée de cette fonction.

EXTÉRIEURS

C’est pas moi qui l’ai fait ! L’autoportrait en regard de la psychanalyse. Jean-Paul Rathier

Le genre autobiographique m’ennuie. Quant à l’autofiction – gadget éditorial de plus en plus prisé et primé par les médias –, j’y suis allergique, définitivement. Loin de ces boursouflures d’un narcissisme pathologique, je préfère fréquenter les œuvres d’artistes et d’écrivains qui, dans l’expérience de l’autoportrait, se risquent à dire ou à montrer ce « peu de soi » auquel les réduit, comme par nécessité, leur acte de création. Ainsi la parole solitaire de Beckett qui dans Mal vu mal dit en vient à s’exclamer : « Moindre. Ah le beau seul mot », « moindre minimement. Pas plus 1 ». Un art du suspens, du retrait et de l’ascèse, qui n’est pas sans rapport avec l’invention du sujet dans la cure analytique, quand un dire enfin désencombré des historiettes autobiographiques, qui jusque-là faisaient écran, parvient à se faire entendre dans ce « murmure à peine » où transite un presque rien délogé de son écrin de silence.


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PSYCHANALYSE N°11

Phallus et fonction phallique (suite et fin)

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janvier 2008

THÉORIE 

Topologie, religion, psychanalyse. Marie-Jean Sauret

Nul doute que le couple « psychanalyse, religion » n’apparaisse comme une question de cours classique, annonçant l’une des contributions majeures de l’anthropologie psychanalytique. Pourtant, n’est-ce pas au prix d’un quiproquo ? D’une part, les interventions de Freud relatives à la religion sont dictées par les leçons de la cure ; d’autre part, la psychanalyse s’est imposée, certes, comme une interlocutrice…

Un faux pas-tout. Patricia León-Lopez

« Un faux pas-tout » : Patricia León-Lopez donne un nouvel élan au débat sur la sexualité féminine, ouvert en 1925 autour du primat du phallus posé par Freud, emmené par Lacan dans un au-delà de la castration – avec l’élaboration d’un autre espace, celui du pas-tout phallique – mais aujourd’hui enlisé, dit-elle, dans deux erreurs : l’une, erreur logique, pose une fausse équivalence structurale entre le pré-oedipien et le pas-tout phallique ; l’autre, erreur « topique », situe d’une manière erronée le ravage mère fille, et, de là, conceptualise une dominance de la femme en tant que mère et un clivage mère-femme qui procède d’un faux pas-tout, équivalent à l’incomplétude. La 1ère partie de l’article replace ce qu’il en est du pré-oedipien chez Freud, en tant qu’il donne à la fille les conditions de départ permettant d’ouvrir l’espace du pas-tout phallique et les voies d’une jouissance féminine, qui s’articulent structuralement au pas-tout du pré-eodipien, mais ne se confondent pas avec lui. La 2ème partie s’oriente à partir des dialogues entre Wendla (14 ans) et sa mère dans L’Éveil du Printemps de Wedekind. P. León-Lopez y redéfinit la frontière entre le registre du ravage mère-fille et celui du pas-tout, proposant de lire le ravage comme l’enfermement dans la demande, illusoire, d’une transmission possible d’une essence de la féminité (en se passant du phallus), alors que le pas-tout procède, à partir de cet impossible à transmettre (prenant appui sur la fonction limitée du phallus), de l’ouverture vers le féminin. Mais si le ravage est posé, au contraire, comme une épreuve à traverser, pour dépasser cette illusion , « on finit par faire consister le tout en isolant l’accès au féminin dans le circuit fermé de la relation mère-fille », dit P. León-Lopez, ce qui recouvre le réel du ratage et conduit à une conception de l’amour recouvrant l’impossible du rapport sexuel, et procédant d’un autre ravage, celui qui ferme à une femme la porte de la rencontre avec l’homme.

Cause et détermination. Laure Thibaudeau 

« Cause et détermination » : reprenant la question, toujours énigmatique, de ce qui se passe pour le sujet dans le trajet analytique, Laure Thibaudeau éclaircit l’articulation logique des termes en jeu dans la cure, et distingue deux franchissements majeurs à partir du désir : celui du plan des identifications où le sujet rencontre la castration et sa butée (le désir y est fondé comme manque) ; et le temps de l’extraction du sujet de sa place d’objet de la jouissance de l’Autre où le sujet rencontre sa division et ce qui la cause, l’objet a, qu’il doit reconnaître pour que soit possible la détermination de sa place dans le monde (le désir y est rencontré comme coupure). En dépliant deux cas cliniques selon ces axes, L.Thibaudeau nous rend sensible le « saut extraordinaire » que fait Lacan avec la topologie, en donnant son efficace à la fonction du symptôme : « un cruel effort pour exister ». 

L’ASSOCIATION

La passe comme intégrale. Yann Diener 

« La passe comme intégrale » : Yann Diener en appelle à « tenter une écriture de la dispersion », qui caractérise le mouvement lacanien, en opposition à la conception ensembliste de l’IPA, massification considérée comme mortelle pour la psychanalyse. Pour parvenir à cette écriture, Y.Diener propose de mettre au travail la notion mathématique d’intégrale (déjà évoquée par Lacan, puis récemment par Erik Porge à propos des associations, et par Pierre Bruno pour repérer la passe) : « pour maintenir la passe au principe de l’expérience analytique, nous avons à calculer l’intégrale des petites et immenses variations entre les différents dispositifs mis en place ».

LA PASSE

Escale. Marie-Claire terrier 

« Escale », « Tu repasseras par là…», et « Un nom comme symptôme », sont trois témoignages de passe, le premier quand la distance à traverser « jusqu’à l’autre côté du fleuve » est trop grande ; le second, celui de C.Cros, qui n’a pas produit un AE, interroge l’opportunité d’une « clinique des non-nommés » conçue à partir des effets de la passe ; le troisième, par M. Lateule, met l’accent sur le temps de la nomination (au titre d’AE), après lequel, elle s’est trouvée, étrangement: « encombrée d’un nom comme on peut être encombrée d’un symptôme gênant ».

Tu repasseras par là… Christian Cros

« Escale », « Tu repasseras par là…», et « Un nom comme symptôme », sont trois témoignages de passe, le premier quand la distance à traverser « jusqu’à l’autre côté du fleuve » est trop grande ; le second, celui de C.Cros, qui n’a pas produit un AE, interroge l’opportunité d’une « clinique des non-nommés » conçue à partir des effets de la passe ; le troisième, par M. Lateule, met l’accent sur le temps de la nomination (au titre d’AE), après lequel, elle s’est trouvée, étrangement: « encombrée d’un nom comme on peut être encombrée d’un symptôme gênant ».

Un nom comme symptôme. Marianne Lateule

« Escale », « Tu repasseras par là…», et « Un nom comme symptôme », sont trois témoignages de passe, le quand la distance à traverser « jusqu’à l’autre côté du fleuve » est trop grande ; le second, celui de C.Cros, qui n’a pas produit un AE, interroge l’opportunité d’une « clinique des non-nommés » conçue à partir des effets de la passe ; le troisième, par M. Lateule, met l’accent sur le temps de la nomination (au titre d’AE), après lequel, elle s’est trouvée, étrangement: « encombrée d’un nom comme on peut être encombrée d’un symptôme gênant ».

LA STRUCTURE

Phallus et fonction phallique chez Lacan

« Phallus et fonction phallique chez Lacan » constitue la 3ème partie (après les n°8 et 10) de « l’inventaire » du concept. La 2ème partie, ayant discuté la question : le phallus est-il le signifiant du désir ou/et de la jouissance ? – finissait sur cette lecture structurale : tout sujet, homme ou femme, est privé du phallus symbolique, Φ, impossible à négativer, signifiant de la jouissance. D’où la thèse : le Phallus est signifiant du désir si le sujet dispose de la métaphore paternelle, mais il est signifiant de la jouissance pour tout sujet. De là, cette 3ème partie cherche à préciser la fonction du phallus dans l’économie de la jouissance du sujet. Du séminaire XIV (La logique du fantasme) au séminaire XX (Encore), Lacan recourt à la logique mathématique, et élabore deux formules (la fonction phallique et la jouissance phallique), pour mettre en écriture le rôle du phallus dans la différence des sexes et dans la relation sexuelle. Cette construction (reprise notamment à travers les formules de la sexuation), éclaire des affirmations décisives de Lacan, comme «  la signification du phallus est un pléonasme », « il n’y a pas de rapport sexuel », « le phallus fait obstacle au rapport sexuel ». Après Encore, émerge une autre question : celle du statut de réel du phallus, que situe l’approche du séminaire RSI et celle, topologique, du Sinthome. Après les dernières thèses lacaniennes quant à la fonction du phallus (1975-1976), cet inventaire se conclut sur la proposition de deux théorèmes articulant le phallique et la jouissance, puis situe en quels points la « querelle du phallus » fait retour, certes implicite, dans certaines lectures post-lacaniennes.

EXTÉRIEURS

Les bienveillantes mises en questions. Henri Dedet

« Les Bienveillantes mises en question » : partant de la « question brûlante » que pose le roman historique de J.Little, « celle de ma proximité avec ce Dr Aue lieutenant colonel SS », H.Dedet récuse la thèse du héros qui fait sien l’impératif catégorique de la philosophie kantienne, le « devoir obéir aux ordres » étant incarné dans la volonté du Führer. Il la récuse précisément au moyen de l’éthique kantienne, de « l’exigence d’un humanisme pratique », et déplace ainsi la question : « Aurais-je été capable de cette transcendance nécessaire pour agir au-delà des déterminations qui m’auraient poussé à l’obéissance ?» – pour aboutir à une position ferme : « je refuse de comprendre un SS, de le prendre avec moi.

Les ténèbres du démenti. Isabelle Morin

« Les ténèbres du démenti », d’Isabelle Morin, prolonge cette position en montrant que la psychanalyse s’oriente non sur la compréhension du passage à l’acte, mais à partir du signifiant en tant que trace, même infime, pouvant conduire à la vérité du sujet. Du livre de Gitta Sereny, Au Fond des Ténèbres, recueil de la parole d’un commandant de Treblinka, I. Morin fait un « témoignage sur le démenti », processus de défense dont elle articule le statut dans la structure et dans la responsabilité d’un sujet.


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PSYCHANALYSE N°10

L’amour, l’occulte et le phallique

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septembre 2010

THÉORIE

Lacan, l’amour. Jean-Paul Ricœur 

« L’amour… on peut se demander s’il s’agit d’un concept proprement psychanalytique et non pas plutôt d’un thème relevant de la psychologie, voire de la philosophie – “les philosophes, ils ne parlent que de ça”, affirmait en tout cas Lacan. Si on ouvre le bien connu Vocabulaire de la psychanalyse de Laplanche et Pontalis, on constate qu’il n’y a pas d’entrée “amour”. Si on veut entendre parler d’amour, il faut se reporter à l’entrée “objet” pour voir apparaître l’amour, l’amour pour l’objet dans la “relation d’objet”.»

Partant de la Verliebheit de Freud (à distinguer de l’amour : Liebe) Lacan a-t-il fait de l’amour un concept psychanalytique ? J.P. Ricœur parcourt vingt-cinq ans d’élaboration, partant de l’amour de transfert et de l’amour narcissique (séminaire I), jusqu’à la conception, si singulièrement lacanienne, du séminaire Encore – de l’amour comme suppléance au rapport sexuel qu’il n’y a pas – avant le dernier pas de 1977, qui pose l’amour, pur événement de rencontre, comme touchant au réel.

L’occulte et le réel. Pierre Bruno 

« Freud, en 1925, écrit “Die Grenzen der Deutbarkeit ”, “Les limites de l’interprétabilité”, un des trois suppléments à l’ensemble de la Traumdeutung. Ce supplément est suivi par “La charge de responsabilité morale à l’égard du contenu des rêves” et “La signification occulte des rêves”. Dans le premier supplément, il s’agit de savoir si “l’on peut donner de chaque produit de la vie de rêve une traduction complète et assurée dans le mode d’expression de la vie de veille [interprétation]”. En réalité, deux questions vont être traitées par Freud. La première concerne le fait de savoir si tout rêve a un sens. La seconde si, cette question ayant reçu une réponse positive, l’interprétation est “complète”. »

« L’occulte et le réel » s’intéresse aux trois suppléments à la Traumdeutung, écrits par Freud à partir de 1925. Dans le troisième, « La signification occulte du rêve », chose étonnante, Freud mentionne sa croyance à l’existence de phénomènes télépathiques. Dans le séminaire  Les non-dupes errent, Lacan souligne que Freud, dans son déchiffrage du rêve, s’arrête à son sens sexuel et touche en cela à une limite de l’interprétation, puisque le sens sexuel ne permet pas d’accéder au sens du rapport sexuel. Pierre Bruno poursuit en définissant que l’occulte, c’est précisément le réel en tant qu’il n’est pas reconnu comme inaccessible au sens. Penser pouvoir résoudre la question de l’occulte par l’initiation, c’est le contraire de la psychanalyse, conclut Pierre Bruno, qui ouvre la perspective de la passe comme pouvant éviter à la psychanalyse, quand elle aborde le réel de la jouissance, de glisser vers l’initiation, sur une pente que Lacan lui-même a fermement récusée en 1974.

L’ASSOCIATION

La psychanalyse au Canada, vue du Québec. Annick Passelande, Robert pelletier

« Pourriez-vous vous présenter de façon à permettre au lecteur de saisir à partir de quelle position vous appréciez la situation québécoise et plus largement canadienne ? »« La psychanalyse au Canada, vue du Québec », en faisant le point sur l’histoire de la psychanalyse et les politiques de santé mentale au Québec, amène cette problématique qui en dépasse le cadre : comment peut-on pratiquer la psychanalyse dans un contexte qui n’est pas favorable ? 

LE CAS

Ida Bauer, la Dora de Freud. Karin Adler

« En 1957, dans la revue américaine Psychoanalytic Quarterly, Felix Deutsch publie un article joliment intitulé “A footnote to Freud’s fragment of an analysis of a case of hysteria”, traduit en français sous le titre d’ “Apostille au « Fragment d’une analyse d’hystérie »”, où l’auteur nous donne quelques renseignements nouveaux sur la vie et la mort de Dora, dont Arnold Rogow dévoilera le nom en 1978 dans son article “A further footnote to Freud’s fragment of an analysis of a hysteria”  : Ida Bauer. »

« Ida Bauer, la Dora de Freud » présente la particularité d’apporter des éléments biographiques sur Dora, du temps de sa cure de jeunesse avec Freud, puis dans le cadre de ses entretiens ultérieurs avec Félix Deutsch, jusqu’à l’arrangement inattendu qu’elle trouve avec la persistance de sa névrose.

LA PASSE

L’accord d’accord. Guy Le Gaufey

« (Ce qui suit se veut un plaidoyer pour un certain style de passe pratiqué dans l’ELP, afin que se prolonge cette aventure, pour autant qu’elle s’inscrit en porte-à-faux au regard des exigences de légitimité des discours ambiants.) Il se peut que l’idée la plus ruineuse pour la passe tienne dans ce distinguo tout simple, énoncé peu de temps après sa mise en place, et selon laquelle surviendrait d’abord dans le cours d’une cure un type d’événement tel que, dans un temps second, il appellerait une procédure spéciale – celle-là même que Jacques Lacan inventa de toutes pièces dans sa “Proposition d’octobre 1967” – pour qu’on puisse en savoir quelque chose. »

« Passe et nomination » déplie des points fondamentaux de la « Proposition d’octobre 1967 », par laquelle Lacan, propose (le mot est essentiel) son invention de la passe comme une « possibilité réglée d’accord » entre trois acteurs qui jouent chacun une partie mettant en jeu des conséquences décisives, puisqu’elles concernent la fin du transfert, le « s’autoriser » d’un analyste, et le réel (ou  « ratage du réel ») dans la position de l’analyste. 

LA STRUCTURE

Phallus et fonction phallique chez Lacan.

« Le constat que nous faisons d’emblée en abordant le concept de phallus chez Lacan est qu’il constitue une pièce maîtresse de la structure. Il est solidaire à la fois du complexe de castration, donc de l’Œdipe, du langage, donc du rapport entre signifiant et signifié, et du réseau symbolique des échanges, notamment les structures élémentaires de la parenté. Solidaire également de la métaphore paternelle, du nouage entre le réel, le symbolique et l’imaginaire, de ses modes d’assujettissement (psychose, névrose, perversion) et enfin de la cure analytique elle-même, de son déroulement, de sa terminaison et de sa fin, du transfert. »

« Phallus et fonction phallique chez Lacan » constitue la deuxième partie (suite et fin au n°11) d’une synthèse qui traite de ce concept en tant qu’il constitue une pièce maîtresse de la structure. Elle interroge le statut du phallus, introduit d’emblée comme symbolique dans l’enseignement de Lacan, et l’aborde, notamment, sous l’angle des trois modalités lacaniennes du manque, puis à travers la discussion de cette question essentielle : le phallus est-il le signifiant du désir ou/et le signifiant de la jouissance ?

EXTÉRIEURS

« L’homme de bien ne sort pas de sa place. » Langue, discours et constitution des savoirs dans la Chine classique (Xe-XIXe siècle).

« Les lettrés confucéens ont dominé en Chine la sphère intellectuelle pendant le millénaire allant des alentours de l’an mille à l’aube du XXe siècle. Rarement idéologie fut plus durable, ni plus homogène, ni ne concerna un pays plus peuplé. Personne ne croit que, malgré la page historique et culturelle tournée depuis le début du XXe siècle, elle n’a pas continué d’exercer ses effet tout au long de ce dernier, ni ne les exerce encore aujourd’hui. »

« L’homme de bien ne sort pas de sa place », qui porte un sous-titre « Langue, discours et constitution des savoirs dans la Chine classique », condense les traits fondateurs de la pensée néo-confucéenne ayant dominé la culture chinoise jusqu’au début du XXe siècle : idéalisation d’un savoir total et clos portant sur « l’Étude de la Voie », qui vise à produire un modèle figé de conseillers accomplis (les Mandarins) en organisant le déni du réel de la modernité.


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PSYCHANALYSE N° 9

Le narcissisme. Les fondements de l’humain

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mai 2007

THÉORIE

Le narcissisme et la question de l’originaire. Marie-Claude Lambotte

À la question laissée en suspens par Freud dans “Pour introduire le narcissisme” sur la nature de cette “nouvelle action psychique” qui doit venir s’ajouter à l’autoérotisme pour donner forme au narcissisme, Lacan répond par la formation de l’image spéculaire et la constitution imaginaire du moi qui s’ensuit. Et l’on sait depuis le stade du miroir, trop souvent réduit aux seuls avatars de l’image issus d’un processus identificatoire complexe, toutes les incidences psychopathologiques qui s’en sont trouvées répertoriées, et cela sous des enseignes très vagues, dont la fameuse “faille narcissique” offre un bon exemple. »

« Le narcissisme  et la question de l’originaire » tire son actualité d’une clinique moderne s’intéressant aux formes variées d’altération du moi (dépressions, mélancolie, états dits « limites » ). Revenant à l’origine du moi freudien, M.C. Lambotte montre que la question du narcissisme est fondamentale parce que constitutive de notre rapport au monde (formation de l’image spéculaire, « par quoi est narcissiquement structuré tout amour », dit Lacan ; fonction de l’Idéal du moi). Recourir à ce mécanisme originaire amène, au-delà des ambiguïtés de la classification clinique, à entrer dans une logique de la dépression, du deuil et de la mélancolie, porteur d’hypothèses nouvelles.

À propos de la parution des Lettres à Fliess de Sigmund Freud. Sophie Aouillé

À l’instar de la recommandation de Freud et de Lacan qui ne manquèrent pas, chacun à sa façon, de rappeler qu’il faudrait aborder chaque cas comme si l’on n’avait rien appris des précédents, comme si l’on ne connaissait rien de la théorie, il faudrait pouvoir aborder ces Lettres à Fliess, enfin disponibles en français dans une version non expurgée, comme si l’on n’avait jamais rien lu, comme si l’on ne connaissait rien de la relation qu’entretinrent pendant dix-sept ans Sigmund Freud et celui que Lacan nommera “le médicastre, le chatouilleur de nez”, le médecin berlinois Wilhelm Fliess. »

« Lettres à Fliess », faisant suite à l’événement français de la publication des lettres en 2006, éclaire d’un jour nouveau le mythe de l’autoanalyse de Freud, et ses conséquences pour la psychanalyse.

L’humain est-il une chimère ? Catherine Joye-Bruno 

Dans son édition datée du 7 octobre 2006, le journal Le Monde nous informait que “trois équipes britanniques de biologistes de renom s’apprêtent à créer, via la technique du clonage, des embryons chimériques […] obtenus à partir d’un noyau de cellule humaine placé au sein d’un ovocyte de lapine ou de vache, préalablement énucléé”. Cette nouvelle avancée dans les possibilités scientifiques relance une problématique, régulièrement posée depuis l’avènement des technosciences et dont les éthiciens se sont emparés : en quoi la transgression de la barrière des espèces remet-elle en cause la définition de l’humain ?…

L’ASSOCIATION

L’association. La psychanalyse en Grèce.

« Psychanalyse en Grèce » retrace l’histoire psychanalytique, dans laquelle sont notamment passés les personnages de Freud et de Marie Bonaparte, et rend compte de la situation actuelle, où la psychanalyse reste une pratique marginale, entravée à divers titres, mais en phase d’extension.

LE CAS

Le cas des sœurs Papin : une question de style. Dominique Lechevallier

Le cas des sœurs Papin stigmatise la question de la folie dans le seul passage à l’acte. Peu de commentaires, peu d’éléments accessibles, tout cela paraît creuser l’énigme. Pourtant on en parle : en 1983, Broadway donnait une pièce écrite sur ce fait, tandis que sur place, au Mans, un jeune cinéaste produisait un film sur le même canevas. Après Eluard, Sartre, Genet et bien d’autres, dont deux films il y a encore trois ans, ces productions attestent que le passage à l’acte des sœurs Papin ne cesse pas de ne pas s’écrire. »

« Le cas des sœurs Papin » repris par D. Lechevallier, éclaire, sous un jour subversif que seule la psychanalyse peut apporter, la sombre question du passage à l’acte, sur laquelle Lacan s’était à l’époque prononcé. 

LA PASSE

L’absente. Pierre Bruno

C’est à la fin de notre séminaire que je me suis avisé, et l’ai dit à Sophie Aouillé, qu’il y avait une “absente” dans son enquête : l’École freudienne de Paris. Bien entendu, cette absence allait de soi, puisque l’ambition de Sophie Aouillé était de nous informer sur les associations existantes en 2007. Mais cette absence n’en a pas moins un relief lié à ceci que la naissance et l’histoire infantile de la passe ont eu lieu dans l’EFP, de 1967 à la dissolution de 1980. Il n’est pas très risqué de penser que les raisons qui ont conduit Lacan à faire ce qu’il appelle, en octobre 1968, une “petite réforme”, comme l’accueil, approbatif ou hostile qu’elle a reçu, nous permettent, in statu nascendi, de saisir les enjeux de la proposition et aussi de constater que ces enjeux sont ceux-là mêmes qui, en 2007, nous éclairent sur les lignes de partage que nous avons pu constater. »

« L’absente » est un commentaire de P. Bruno sur un séminaire : « L’enjeu de la passe » dont la grande absente était l’Ecole freudienne de Paris, que l’article resitue dans les péripéties et les enjeux ayant marqué la  «Proposition du 9 octobre 1967 » par Lacan, puis le démarrage de l’expérience de la passe à l’EFP.

La lettre aux italiens… et à quelques autres. Érik Porge

Le texte dont nous allons parler est une lettre. À tous les titres du terme, comme celles de Freud à Fliess, comme la lettre volée. Au départ, il s’agit d’une lettre que Lacan a adressée à trois personnes, trois de ses analysants, aussi analystes, résidant en Italie : Armando Verdiglione et Giacomo Contri à Milan, Muriel Drazien à Rome. Trois personnes que Lacan a appelées son “tripode”. Les deux premières sont italiennes et Muriel Drazien était à l’époque depuis peu en Italie. »

« Lettre aux Italiens », s’inscrit dans l’histoire de Lacan en Italie, au fil laquelle, nous montre E. Porge, le chiffre « trois » n’a cessé d’insister : « tripode » de destinataires auquel était adressée la lettre et sur lequel Lacan voulait asseoir une école italienne rassemblée sous la bannière de la « Cosa freudiana » ; trois fois où Lacan a parlé à Rome. L’originalité de la Lettre consistait en une articulation nouvelle entre la passe et l’association. Même si son projet n’a pas pu fonctionner en 1974, « la lettre insiste », dit E. Porge, entre autres comme référence pour chercher à réunir, autour d’une passe en commun, des associations actuelles… au nombre de trois.

Du « maudit »… au mal-dit. Bernadette Etcheverry

Témoigner ?… Pourquoi ?Lorsque j’entends ou lis des témoignages de passe, je suis frappée par le caractère inédit et singulier de chacun et j’éprouve en même temps un sentiment de proximité, voire de familiarité, avec ce qui s’y trame. Il y a comme un effet de re-connaissance, non sur le modèle identificatoire, mais au-delà, à ce niveau qui fonde proprement le tissu humain dont parle Lacan et qui, pour reprendre une expression de Marie-Jean Sauret, “ne saurait faire d’un être humain un animal”. »

Quand nous lisons le témoignage de passe, intitulé « du Maudit… au mal-dit», nous sommes en effet sensibles à un « effet de re-connaissance », comme le dit B. Etcheverry, par lequel sont touchées des questions aussi universellement humaines que : « Et le féminin, alors ? », et une réponse singulière dans cette passe accomplie.

EXTÉRIEURS
 L’œuf, le bœuf, la meuf. Rémi Checchetto

« Ça commence comme ça : t’as mal. T’es mal. T’es une momie dès le matin, une pile électrique le soir, faisant le négatif de tes gestes, passant par le zéro, côtoyant la boîte à pharmacie, t’as de brusques reflux du temps et tu prends du Maalox affirmant que ce sont des reflux gastriques, tu dérapes dans des temps morts sur les bas-côtés de ton histoire et changes les pneus de ta voiture, tu respires mal et clames qu’ils ne font rien et que dalle à Kyoto, tu dis avoir mal aux oreilles alors que tu endures de n’être pas assez sourd, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, aïe… »

« L’œuf, le bœuf, la meuf », texte poétique autour de ce qui pousse et aboutit à écrire (“tu as la perfection de l’œuf, tu es un écrivain”), croise la psychanalyse, notamment au point où il énonce : “Ceux qui sont sur le mou divan ne s’ignorent plus et c’en est fini de leur écriture”, ce qui nous interpelle sur le traitement du désir.

FREUD

La psychanalyse au Viêtnam. Frédérique F. Berger, Dam-Thu Nguyen Hac

Psychanalyse : Le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Sigmund Freud et la parution en vietnamien des Trois essais sur la théorie de la sexualité nous conduisent à parler avec vous de l’introduction de son œuvre et de la situation de la psychanalyse au Viêtnam. Frédérique F. Berger : Permettez-moi d’abord de vous présenter madame Nguyen Hac Dam-Thu, qui m’a fait l’honneur d’accepter de…

HOMMAGES À ROSINE ET ROBERT LEFORT 

Hommage à Rosine Lefort. Laure Thibaudeau

Rosine Lefort n’est plus. « C’est donc tout à la fois sur l’existence ou la non-existence de l’Autre, sur ce qui lui promet son existence et ce qui lui permet son inexistence ; c’est là-dessus que porte le choix et dans ce cas il est plausible », dit Lacan. Ce choix paradoxal se déplie tout au long de la cure analytique, et il aboutit à la conclusion que l’Autre est barré parce qu’il n’existe pas…. 

Hommage à Robert Lefort. Pierre Bruno

Sur l’instigation de mon analyste Maud Mannoni, j’ai été voir Robert Lefort pour un contrôle dans l’année 1977. Ma pratique d’analyste était alors débutante et je travaillais à l’hôpital de Montauban où je recevais des enfants, psychotiques pour la plupart. J’ai été ainsi le voir pendant environ cinq ans et je me souviens de la grande patience dont il témoignait à mon égard. La plupart du temps, il… 


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PSYCHANALYSE N° 8

Phallus et fonction phallique

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janvier 2007

THÉORIE

Les mots et la chose. Isabelle Morin

« Les mots et la Chose » s’ouvre sur une interrogation dialectique dont les termes sont deux versions possibles de l’humanisation : qu’est-ce qui est premier, des mots ou de la Chose, du réel ou du symbolique ? La réponse d’I. Morin est condensée dans sa déclinaison du célèbre énoncé freudien (« Wo es war, soll ich werden ») sous la forme « Là où était la Chose, tu peux savoir », à condition de donner un certain statut à ce savoir, qu’elle déplie au fil d’un développement reprenant pas à pas l’abord, toujours difficilement saisissable, de la Chose freudienne.

« Là où c’était (la Chose), Scilicet ?Il y a deux versions possibles de l’humanisation. Elles ne sont pas exclusives mais elles méritent sans doute d’être dialectisées. La première dirait qu’au commencement était la Chose, puis vinrent les mots. La seconde considérerait que tout a commencé avec les mots qui ont fait exister la Chose. Ces deux versions répondent à deux élaborations différentes de la constitution du sujet. Une qui fait prévaloir l’objet « […]  [Extrait de l’article]

L’évidement du savoir et le style de l’inconscient. Luz Zapata-Reinert 

« L’évidement du savoir et le style de l’inconscient » aborde cette question fondamentale, depuis Freud : « Comment s’enseigne la psychanalyse ? » – qui semble paradoxale si l’on considère que la psychanalyse produit, de structure, une opération de soustraction dans le savoir. A partir de cette opération d’évidement, par laquelle naît un sujet, L.Zapata Reinert nous introduit à ce qu’articule Lacan de l’acte et du style de l’analyste.

« Comment s’enseigne la psychanalyse aujourd’hui ? Répondre à cette question suppose d’affronter au moins deux paradoxes que je vais essayer de présenter en les mettant en perspective avec mon propre parcours dans la psychanalyse et dans l’enseignement ». [Extrait de l’article]

L’Oblativité : premières controverses. Christine Ragoucy

Dans « L’Oblativité », C.Ragoucy dégage les grands axes des controverses dont ce concept a fait l’objet, depuis son invention en 1926, en France, puis montre que la critique qu’en fait Lacan (en 1938) a une portée qui dépasse l’argument historique, en ce qu’elle annonce son retour à Freud et sa théorie langagière de l’inconscient.

« Généralement, quand on mentionne les critiques de Lacan sur l’oblativité, on fait référence aux débats de Lacan et de la génération de l’après-guerre des psychanalystes de la Société Psychanalytique de Paris, autour de la question de la relation d’objet. Les coordonnées en sont posées en 1958 dans “La direction de la cure” quand Lacan établit de façon définitive le statut de cette notion dans la psychanalyse : l’oblativité est une des modalités de la relation d’objet, celle mise en jeu dans le fantasme de l’obsessionnel pour escamoter son désir. Les dernières références importantes à l’oblativité chez Lacan datent de 1964. »[Extrait de l’article] 

Du Signe… à la Lettre vivante. Yamina Guelouet 

« Du Signe…à la Lettre vivante » est une conception du trajet qui s’opère du début à la fin d’une analyse, trajet qui reviendrait, dit Y. Gelouet, à celui qu’a accompli le sujet dans les conditions initiales où son désir a émergé : quand l’enfant adresse un appel au père, et qu’il reçoit de lui le Signe du nom propre, parole d’amour, qui lui ouvre la voie au désir via la castration de la mère. Le Signe, au terme de ce trajet, est transmuté dans l’inconscient en Lettre vivante (Y. Gelouet précisant, d’après Freud, en quoi consiste cette lettre) qui est aussi ce qui s’incarne au terme d’une analyse.

« Le titre évoque un trajet entre deux moments, celui où un Signe apparaît, et l’autre où il s’écrit. C’est un Signe porteur d’amour, qui traverse une cure, non sans remous, et accompagne l’être parlant, qui comme corps vivant sexué se trouve pris dans des impasses que le langage, de structure, lui impose. L’être parlant, en toute ignorance, orienté par un réel, celui de la jouissance de l’être, poursuit un dessein, celui de l’atteindre pour réaliser le rapport sexuel. C’est le syntagme que Lacan introduit pour désigner la jouissance absolue que vise cet être ».[Extrait de l’article] 

LA STRUCTURE

Phallus et fonction phallique. Pierre Bruno

« Phallus et fonction phallique » inaugure les synthèses de grands concepts théoriques, proposées par PSYCHANALYSE. Ce n°8 en présente la première partie, situant les temps forts de l’élaboration freudienne, du « fait-pipi » du petit Hans au « primat du phallus », sur lequel Freud n’a jamais cédé. Au-delà des repères connus, sont mis au jour de « vrais diamants », issus de textes inattendus, qui préfigurent le statut du phallus chez Lacan et sa conception de la sexuation, que P.Bruno condense ainsi : « l’échec du langage, c’est le destin».

« La revue PSYCHANALYSE n’est pas une revue à thème, mais elle est articulée en parties. Nous avons décidé d’introduire, sous la dénomination “La structure”, une nouvelle partie. Il s’agit de proposer, à chaque numéro, l’inventaire d’une catégorie (je ne dis pas concept pour tenir compte de la critique du concept dans le dernier enseignement de Lacan). Les catégories sont les différents items ayant trait à l’état civil de l’étant. Sur la carte d’identité de l’étant, Aristote a imprimé dix rubriques : substance (ousia), quantité, lieu, etc. Dans les catégories de Freud et de Lacan, il n’est pas impropre de substituer d’autres rubriques qui se rapportent au parlêtre et non à l’étant en général : phallus, symptôme, Nom-du-Père, Autre, etc. Nous avons choisi de commencer par le phallus, et la fonction phallique. Nous vous invitons donc à la visite du chantier, que nous sommes quatre à mettre en train : Fabienne Guillen, Dimitris Sakellariou, Marie-Jean Sauret et moi-même.

Sans originalité, nous avons distingué : 1) Freud, 2) après Freud et avant Lacan, 3) Lacan, 4) après Lacan. Dans ce numéro, nous traiterons les parties 1 et 2, mais d’ores et déjà seront indiqués les points que nous avons cru pouvoir retenir concernant les parties 3 et 4. Dans le prochain numéro, nous développerons ces parties, sachant que ce développement aura des effets rétroactifs d’ajustement sur ce qui est présenté dans ces deux premières parties, avant la carte finale. Enfin il s’agit d’un savoir, et le style dans lequel celui-ci est exposé ne saurait être indifférent. Nous avons tenu compte de quatre considérations : le savoir est à prendre, non à apprendre ; la psychanalyse est, en tant qu’expérience, intransmissible ; l’exigence d’un savoir lisible et questionnable fait partie de l’éthique de la psychanalyse ; l’exigence d’un exposé symptomal, c’est-à-dire qui n’efface pas mais au contraire relève les points de butée, les évolutions, les ruptures, voire les contradictions, de ceux qui ont construit ce savoir. »[Extrait de l’article] 

La querelle du phallus. Fabienne Guillen 

LE CAS

« Saudade » ou la jeune homosexuelle. Thérèse Charrier

« Saudade ou la jeune homosexuelle» amène au célèbre cas de Freud de nouvelles clés de lecture, portées par la biographie de cette même Sidonie Csillag, parue en 2003. Partant du « C’est à cause de ma mère » qu’elle y énonce, T. Charrier articule différentes versions logiques du thème du « désistement », introduit par Freud.

« “Comment se fait-il que je sois devenue ainsi ? ” se demande Sidonie Csillag à la fin de sa vie.Le contact d’une main, un mouvement du corps avaient pu l’exciter bien plus que les zones du corps sur lesquelles tout le monde orientait impérieusement le plaisir. Comme elle trouvait horrible l’endroit sombre et la “chose” menaçante entre les jambes des hommes ! combien angoissante, bien qu’un peu mieux quand même, la plage humide chez les femmes ! combien repoussante une langue dans sa bouche ! Quand enfin ça finissait par réussir, avec ses amours, c’était déjà terminé. Comment se fait-il que je sois devenue ainsi ? C’est “à cause de ma mère… toutes les femmes étaient des ennemies pour elle… Et seule, cette beauté, celle de ma mère, la mienne et celle de beaucoup de femmes m’a émue et a déclenché en moi de très violents sentiments ; j’ai toujours été amoureuse de la beauté ; une belle femme est toujours une jouissance pour moi, il en sera ainsi jusqu’à la fin de ma vie.”[Extrait de l’article] 

L’âme. Patricia León -Lopez

Dans « L’âme », P. León-López ouvre une perspective, féminine en quelque sorte, dans la lecture du cas de Dora, en y déployant les différents termes du rapport qu’entretient la femme (hystérique) avec l’âme : la position de la « belle âme », la question sur « l’être femme », l’amour de l’âme que Lacan écrit « elle âme l’âme ».

« Pourquoi Dora ? Au début du dernier chapitre de la Psychopathologie de la vie quotidienne, Freud s’interroge sur ce qui a pu le déterminer a choisir le prénom de “Dora” pour la publication de ce “Fragment d’une analyse d’hystérie”. Ce prénom était le prénom familièrement donné à une gouvernante au service de sa sœur Rosa. La prétendue Dora s’appelait en réalité, elle aussi, Rosa et ne pouvait conserver le même prénom que la maîtresse de maison. D’où la substitution, que Freud apprit par hasard, un soir où il se trouvait chez sa sœur, et qu’il déplora. »[Extrait de l’article]

LA PASSE

Le souci du passant. Panos Papatheodorou

« Le souci du passant » et « Une frontière enfin possible » sont deux textes sur la passe : l’un est une élaboration de P. Papatheodorou sur ce qui est en jeu dans le temps logique où le passant choisit de faire la passe ; l’autre est un témoignage, où Mariane Lateule nous rend sensibles à la fois ce choix du moment, lié à des événements singuliers, et les effets de la passe, dont le « enfin possible » prend valeur universelle.

« Il s’agit de mon texte d’intervention tel qu’il a été prononcé au colloque “La passe de Lacan et l’expérience psychanalytique” tenu à Athènes le 3 juin 2006. Tout d’abord, je tiens à expliquer le titre de cette intervention. Le mot “souci” qui est de toute façon un signifiant, est une traduction de “μέλημα” dérivé du verbe “μέλει” qui, en grec ancien, est impersonnel et signifie s’occuper de quelqu’un ou de quelque chose, et plus précisément en prendre soin. Par conséquent, la question est de savoir quel est l’objet de cet acte. “Un signifiant représente, comme nous le savons, le sujet pour un autre signifiant.” Un signifiant, choisi parmi d’autres pour me représenter, va de pair avec d’autres signifiants. Je prends alors le signifiant souci de ce topos qui s’ouvre entre le sérieux et l’attente, tel qu’il a été posé par Kierkegaard et ensuite par Lacan dans son séminaire sur l’Angoisse ».[Extrait de l’article ] 

Une frontière enfin possible. Marianne Lateule

« Le souci du passant » et « Une frontière enfin possible » sont deux textes sur la passe : l’un est une élaboration de P. Papathéodorou sur ce qui est en jeu dans le temps logique où le passant choisit de faire la passe ; l’autre est un témoignage, où Mariane Lateule nous rend sensibles à la fois ce choix du moment, lié à des événements singuliers, et les effets de la passe, dont le « enfin possible » prend valeur universelle.

« Dans l’après coup de la crise institutionnelle à l’ECF et la création de l’APJL, la porte de la passe s’est ouverte ; restait à en franchir le seuil. L’offre de la passe n’était plus demandée, voire commandée par l’Autre, ce grand Autre qu’incarnait pour moi l’École. C’est au contraire, causé par un désir qui pouvait se passer d’une reconnaissance, que cette possibilité est advenue. Mais un pas de plus s’avérait nécessaire. Ce pas s’est présentée lors de deux évènements de séparation : une séparation réelle sous la forme d’un deuil, et une séparation symbolique touchant le couple mère-enfant. La sortie de la cure m’avait surprise en même temps qu’elle s’imposait. »[Extrait de l’article]

L’ESSAI

Nostalgie du Père « grandiose » dans L’utopie de Thomas Moore. Jean-Bernard Paturet

« Nostalgie du Père grandiose dans L’Utopie de Thomas More »  constitue un essai sur l’utopie, qui repose sur deux piliers : le premier, contre une conception de l’utopie comme retour au maternel, la définit comme nostalgie d’un père grandiose, protecteur et tout-puissant ; le deuxième présente ce père d’amour, (l’Utopus de Thomas more) comme la forme inversée du père de la horde (l’Urvater de Freud), ces deux faces d’une même figure ayant des conséquences qui conduisent J.B. Paturet à une réflexion sur la fin de l’histoire.

« Réfléchissant sur L’Utopie, la plupart des commentateurs y ont vu le retour à un monde maternel caractérisé par l’absence de père. Ainsi Jean Servier dans son livre L’Utopie écrit : “Le communisme utopien tend à écarter l’image du père en la remplaçant par la cité maternelle pourvoyeuse, seule capable de satisfaire tous les besoins”. L’Utopie serait alors un retour à Big Mother pour reprendre le titre du livre de Michel Schneider et signifierait ainsi, l’effort de la culture pour surmonter le traumatisme de la naissance et exprimerait selon le mot de Ferenczi “le désir de régression thalassale et de retour à l’océan abandonné dans les temps anciens”. Elle serait le retour à la Mère Primordiale, matrice de toutes les régénérations et de toutes les renaissances. Nombreux sont d’ailleurs, les termes qui fondent cette interprétation matricielle de l’Utopie et tout particulièrement le thème de l’île et de l’eau. »[Extrait de l’article]


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