PSYCHANALYSE N°24

Le rêve, exclusion interne, l’autisme, le père et ses noms

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 mai 2012

LE SAVOIR DU PSYCHANALYSTE  

L’amont du rêve. Pierre Bruno

Je ne suis pas mécontent de n’avoir qu’un temps limité, dans la mesure où cette contrainte m’obligera à vous exposer une épure de ce que j’entends vous faire part. Cette épure, je l’initie avec l’énoncé d’une question : qu’est-ce que nous pouvons apprendre de Finnegans Wake qui ait des conséquences sur le savoir psychanalytique ayant trait au rêve ? Ce roman, Finnegans Wake, nous conduit-il à amender la Traumdeutung de Freud ? Pour d’emblée renoncer au suspens, je répondrai oui, ce « oui » qui est aussi le dernier mot d’Ulysse.

L’exclusion interne. Isabelle Morin

Dans ma précédente intervention concernant la cure de l’Homme aux rats, j’avais interrogé la façon dont le réel pouvait résonner dans le symbolique pour qu’une extraction conduise le sujet à se reconnaître dans son symptôme. Aujourd’hui, je poursuis à partir d’un renversement préalablement nécessaire pour ouvrir vers une fin d’analyse.

Un labyrinthe imparfait. Florence Briolais

Il faut tout d’abord en repérer l’entrée comme le fit Freud dès la première rencontre avec ce patient lui apprenant à quel degré d’intensité il avait joui, enfant, de sa trop grande proximité avec les femmes, jusqu’à pouvoir palper les organes génitaux de Mlle Rudolf, sa gouvernante. Un labyrinthe où l’on entre par la jouissance en excès. Comment aurait-il pu en sortir ? Tel sera l’enjeu de mon intervention. Et j’avancerai deux hypothèses : le labyrinthe imparfait est le modèle de l’espace subjectif de Ernst Länzer arrivant chez Freud ; et un traitement plus poussé de sa névrose lui aurait permis de trouver la sortie de ce dédale et de changer d’espace subjectif.

Une grotte qui sent l’ours(e) ? Catherine Bruno

Chez les lapons, le mythe fondateur du culte de l’ours, qui était encore pratiqué en Laponie avant que le renne ne le supplante, est un mythe qui met en scène la féminisation de l’ours. L’auteure s’appuie sur son analyse pour reprendre pas à pas le mythe freudien du Père de la horde et tenter ainsi de repérer ce qui vient à les différencier et quelles questions psychanalytiques ces différences peuvent poser. Contrairement au mythe freudien, l’humanisation naît de l’union d’un ours et d’une femme, une union qui pour avoir cet effet doit aboutir à la mort de l’Ours. C’est l’intervention d’une femme par son mariage avec un animal qui permet de générer l’humanité avec la naissance d’un premier fils, qui justement parce qu’il ne tue pas son père, devient humain. L’auteure avance que le partenaire bestial n’est pas un être de jouissance, mais bien plutôt celui qui introduit à la castration.

Mots clés / féminisation, jouissance, castration, mythe, père de la horde

BÉVUE

L’autisme : vers une science au service de l’idéologie ?Ramon Menendez

Des décisions politiques récentes en France semblent aller dans le sens de promouvoir les techniques éducatives et comportementales dans la prise en charge des autistes. Cela se fait en opposition à la psychanalyse et au nom des progrès de la science. L’article décrit les aspects idéologiques et politiques du travail de Eric Schopler, connu pour avoir créé le programme TEACCH dans la prise en charge des enfants autistes et souvent cité comme modèle à suivre. Schopler a mis l’accent sur un travail avec leurs parents. Sans trop se soucier de la dimension subjective des enfants, il organise un réseau de parents d’autistes et fait pression sur les législateurs pour obtenir la reconnaissance de l’autisme en tant que handicap et pour le développement de sa technique pour en faire un programme d’Etat en Caroline du Nord (USA). Les aspects cliniques et scientifiques de son travail ne sont pas d’une grande rigueur.

Mots clés : Autisme, psychanalyse, TEACCH, science, idéologie

LE CAS 

Une conclusion inédite. Christian Cros

En prenant appui sur l’atelier de Toulouse, centré sur les conclusions des cures, je vais dégager, à partir d’un cas clinique, la question de savoir si une articulation peut s’élaborer entre ce que j’appellerai les points de convergences cliniques, qui ramassent ce cas, et la sortie telle qu’elle s’est effectuée. C’est donc une construction que je vous propose, basée sur l’axe qui constitue le cœur de l’expérience subjective de cette femme que j’ai rencontrée, durant treize ans, à un rythme régulier avec une assiduité sans faille.

Un sinthome à la lettre. Sylvianne Cordonnier

« Tu es bon pour l’HP. » Comment V., jeune sujet psychotique, se prend à l’offre de la psychanalyse pour faire du diktat maternel sinthome en en inversant les lettres : « Je serai PH, Professeur d’Histoire. » « J’ai fait un délire paranoïaque mais c’est fini et j’ai 18 ans. » Sur ces mots, le jour de son anniversaire, V. mettra fin à nos rencontres au centre de consultation où il venait régulièrement me rencontrer depuis l’âge de 15 ans. 

LA PASSE 

(Je)u de dupes. Slavka Balat

La rédaction de cet écrit fait suite à ma passe, à ma nomination en tant que AE de l’APJL, mais aussi à une première tentative publique d’élaboration 1. Il a été remanié à maintes reprises au fil du temps de l’écriture, jusqu’à (et à partir de) son point d’arrêt – le point révélant la prise dans ma propre duperie. Il est donc un témoignage partiel des métamorphoses de l’écrit par ce que le cours de l’écriture elle-même – et la confrontation au public – met au jour.

L’expérience de la passe. Secrétariat de la passe

Un secrétariat de la passe peut-il transmettre quelque chose de son expérience ? Nous avons soumis cette question aux membres de l’Association de psychanalyse Jacques Lacan parce qu’elle n’est pas d’usage. Généralement, on situe la transmission du côté des cartels et des passants, plutôt analystes de l’École (AE) d’ailleurs. Le secrétariat, en général, est silencieux.

THÉORIE 

Pile ou face. José Guinart 

Dans son séminaire sur « La lettre volée », dans l’année du séminaire Le moi dans la théorie de Freud et dans la technique de la psychanalyse, Lacan introduit le jeu de pair et impair, utilisant comme représentation du réel l’aléa qui se manifeste dans une série de « + » et de « – » correspondant au tirage du jeu de « pile ou face », l’un ou l’autre. Ce jeu, Lacan l’évoquera aussi dans D’un autre à l’Autre pour le désigner comme en parlait Pascal : « croix ou pile ». Ce « croix ou pile », c’est le réel absolu qui « est précisément quelque chose qui est défini, que nous ne pouvons savoir ni s’il est ni ce qu’il est ». Nous allons nous intéresser à ce jeu avant d’évoquer les parties intersubjectives de pair et impair.

LA STRUCTURE

Le père et ses noms (8e et dernière partie)

Le tore du père ? En novembre 1974, au septième congrès de l’École freudienne de Paris, Lacan prononce à Rome une conférence qui marque, juste avant le début du séminaire R.S.I., un tournant. On peut, sous réserve du développement qui va suivre, caractériser ainsi ce tournant : le questionnement du Nom-du-Père, dans sa parenté avec la réalité religieuse, est un questionnement corollaire sur les Noms-du-Père qui aboutira à mettre (ou remettre) au premier plan ce qu’il en est de la nomination, ou plutôt des nominations. Sans l’élucidation de ce tournant, il serait vain ou du moins très aléatoire de vouloir accéder à l’intelligence du séminaire sur Joyce.


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